jeudi 27 mai 2010

Crevaison mal placée


Je n'avais eu, jusque là, que 2 crevaisons, et encore, de ces crevaisons lentes qui supportent qu'on regonfle le pneu et remette à plus tard sa réparation.
Alors, en ce premier jour sur l'île de Cythère, entre le Péloponnèse et la Crète, où j'ai prévu de passer 2 jours, j'estime que les probabilités sont avec moi lorsque, après 2 km, réalisant que je n'ai pas emporté mon matériel de réparation pour cette sortie à la journée, je décide de poursuivre mon chemin et de compter sur mon étoile.

Las, 1 heure plus tard, le pneu est subitement plat. Il va falloir pousser et je regarde à tout hasard si j'aperçois l'objet du délit afin d'éventuellement l'extraire et éviter des dégats supplémentaires. Point besoin d'Afflelou pour trouver le coupable : une vis est enfoncée de plus d'un centimètre droit à travers le pneu. C'est avec un tournevis cruciforme que je la sors en dévissant !

La dernière route asphaltée est déjà loin derrière moi, sans parler de la route principale qui conduit à mon bagage et mon matériel de réparation : je décide de tenter de rejoindre des villages en contrebas d'où je pourrai faire du stop. J'ai toujours la jambe souffrante de ma chute et si, tant que je suis sur le vélo, je ne sens plus grand chose, je marche d'un boitement très prononcé et douloureux. Mais une piste vers le bas me paraît prometteuse et je m'y engage m'appuyant sur mon vélo que je contrôle avec les freins. Hélas, elle aboutit à une sorte de verger dont il ne ressort rien. Demi-tour mais, cette fois, ça monte ! Je trouve une piste alternative à mi-chemin qui m'évite de revenir sur mes pas puis une autre piste qui descend : une heure a passé. Se déroulant sur une longue crête, que voilà une piste agréable qui ne peut que mener quelque part. Une fourche : l'option de droite s'avère rapidement un cul de sac. Reste celle de gauche où je m'engage fébrilement. Il ne faut pas longtemps pour buter sur la grille d'un pré. Demi-tour toutes. Une deuxième heure a passé lorsque je reviens à l'embranchement de départ. L'envie de manger m'a passé. Je ne suis finalement pas bien loin de mon trajet de l'aller - souvenir du temps béni et insouciant où tout allait bien - et je me fais à l'idée que c'est par là que je devrai m'extraire. Première maison, des appartements de vacances. Une Range Rover immatriculée 75 garée devant ! J'appelle, espérant trouver de l'aide. Seul le silence lourd d'un après-midi de plomb me répond. Des douches dehors, une pergola. Je me dis qu'il ne sert plus à rien de courir contre la montre : la journée est passée. Mieux vaut se remettre en état : un douche bien fraîche au soleil et un déjeuner à l'ombre. C'est dispo que j'entame la longue marche de retour. Encore 5 km à claudiquer, cherchant épisodiquement une âme vivante dans des maisons vides. Finalement, la grand route. Aussitôt, une voiture. Quelques minutes, mon bagage et mon matériel de réparation de crevaisons. Un pick-up, dans la benne duquel j'ai du mal à me hisser, immédiatement dans l'autre sens. 2 rustines (la vis avait traversé la chambre à air de part en part). Et voilà, 5 heures après l'incident, il était clôt !

De fait, le pari d'aller courir les pistes de Cythère sans matériel de secours était, j'allais le comprendre plus tard, suicidaire. Le lendemain, ou était-ce le surlendemain, alors que j'hésitais à réparer immédiatement une crevaison lente à Milopotamos, je décidais finalement de ne pas attendre et profiter d'un petit cours d'eau qui peut être bien utile quand la fuite est peu visible. C'est 3 crevaisons que je trouve ! Et je passe tout le pneu à la pointe du couteau pour extraire les innombrables épines qui s'y trouvent bien et menacent, à un moment ou un autre, de passer à l'acte. Le pneu étant un peu mou en fin d'après-midi, je le désosse encore pour poser une quatrième rustine. Je me dis alors qu'il n'y a pas de raison que le pneu avant, pourtant parfaitement rebondi, ne subisse pas les mêmes affres et effectue un contrôle visuel. Une épine suspecte, démontage, et cinquième rustine de la journée ! Encore 3 crevaisons le lendemain et c'est ma réserve de rustines et de dissolution qui est épuisée ! Je vis un dimanche d'angoisse sur cette île où je ne sais même pas si je trouverai à acheter ces produits, avec une dernière rustine de réserve, un fond de tube de dissolution et une chambre à air de rechange. A la première crevaison, qui a eu le mérite de tarder à venir, c'est retour sur la route. En réalité, toutes les stations-service vendent ce dont le cycliste a besoin et si j'avais croisé plus tôt ces Australiens qui m'en ont révélé le secret, j'aurais pu refaire le plein dès le matin et aller allègrement planter mes 5 épines du jour dans la joie et la bonne humeur.

Moralité, à Cythère, s'équiper de pneus kevlar pour aller chercher les magnifiques plages cachées au bout des pistes !

mardi 25 mai 2010

John


John est néerlandais, 64 ans. Je l'ai connu à Kardamili où il s'était installé près d'Herman qu'il connaissait déjà, et retrouvé quelques temps plus tard à Monemvasia. 40 ans qu'il vient en Grèce en juin ! Et de mars à juin depuis 6 ans qu'il est en retraite. Et de septembre à novembre, c'est sur les côtes portugaises qu'on le trouve. L'hiver, il hiberne au Pays-bas, et s'y met au frais l'été. Il vit dans un Kangoo dont tout un côté est occupé par une couchette et l'autre par des rangements de sa fabrication. La station assise n'est possible qu'en bout de couchette, les pieds sur une planchette qui se déplie à l'horizontale hors du véhicule, les portes arrière du véhicule étant ouvertes. Il a un ordinateur portable notamment pour traiter ses photos, sa passion (voir son site Internet), et ne l'utilise que portes fermées pour ne pas le faire savoir et éviter de se le faire dérober, donc allongé sur sa couchette.
Comme je lui fais remarquer que, dans un fourgon, il pourrait se mettre à l'abri le soir ou quand il pleut, et utiliser son ordinateur, sans devoir s'allonger, il me répond qu'il le sait, qu'il en a eu un et en aura peut-être un, mais que le Kangoo, pour ce qui est des ferries et de la consommation, c'est imbattable. Certes !

lundi 17 mai 2010

Un jour de pluie, un de chute


A part quelques goutelettes échappées de ciels couverts, il n'a fait, dans ce coin d'Europe, qu'un jour de pluie véritable en 2 mois (à suivre !), et encore, une longue matinée plutôt qu'un jour. Plus une grosse averse se prolongeant en pluie un autre après-midi, c'est tout.
Eh bien, ça aura suffi ! Premier jour de pluie, première chute.

Mon pneu avant avait des réactions bizarres. Dans de larges courbes, j'avais senti comme une tendance au dérapage. Or ce n'était pas possible ! J'abordais donc très suspicieux une descente plus raide et étais déterminé à éclaircir la situation dès la première épingle à cheveu. Clarifiée, la situation l'a été instantanément. Arrivé lentement, j'étais déjà par terre. Recroquevillé comme on l'est parfois après un coup, attendant que la douleur ne s'atténue. Mais rien à faire. Quelque chose n'allait pas du côté de la hanche. Par une manoeuvre d'équilibriste, je me remettais sur la selle et, d'une jambe, reparcourais en sens inverse la belle descente que je venais de faire. Un arrêt déjeuner au premier restaurant venu - il ne faut pas se laisser abattre ! - ne voyait guère d'amélioration : je ne pouvais, pour ainsi dire, pas marcher. Et pourtant, il fallait bien que je récupère mes bagages laissés plus haut, et continuer la route vers un endroit "civilisé" où je trouverais ravitaillement et, éventuellement, soins. 40 km à pousser d'une seule jambe avec des côtes épiques, et du vent de face au final. Enfin, une station service pour faire le plein du réchaud à essence et de l'eau. Et un peu plus loin, 3 km avant la ville, une construction abandonnée qui pourrait faire un gîte pour la nuit. Mais c'est un courant d'air. La pinède en dessous à l'air plus accueillante. Il faut que je reconnaisse l'accès car je ne pourrais faire aucune manoeuvre, notamment en direction du haut, avec le vélo. Ce sera descente directe sur l'endroit choisi. Et, là, je sais que je n'en sortirai avec les bagages que remis d'aplomb. Heureusement, mon hôpital de campagne est délicieux de calme, d'ombre et de beauté.

Des jurons pour des glissades sur les aiguilles de pin ou le pied qui bute sur une pierre. Des manoeuvres calculées pour chaque mouvement : s'asseoir, se glisser dans la tente et le sac de couchage, se retourner la nuit, même. Des jours à boiter la mort pour sortir de mon repère, grimper sur le vélo et aller en ville ravitailler, dîner, ou, dans l'autre sens, à la plage. Puis une première tentative de visite dans la vieille ville de Monemvasia, jusqu'à la ville haute ensuite, puis le tour de l'île pour lequel John me prête un bâton de marche sculpté qu'il tient de son grand père, le tour de la ville haute, et je décide, après 8 jours, que je peux reprendre la route. Il y aura encore des arrêts périlleux en montée, lorsque la jambe souffrante ne peut finir son tour de pédale et qu'il n'est pas encore question de la poser par terre sans précaution, des chutes "volontaires" du côté "sain" pour l'épargner lorsque j'aurai repris le VTT sur les pistes, même.

Tout ça pour une petite glissade ! Autant dire que le prochain jour de pluie, c'est repos !

dimanche 16 mai 2010

Anastasia


Couchsurfing, Hospitality club... Des sites Internet pour faire se rencontrer des voyageurs et des locaux qui pourraient les héberger ou simplement leur faire découvrir leur ville.
Seulement, il faut envoyer beaucoup de messages pour avoir des réponses. Il faut savoir quand on sera où. Et il faut Internet, très souvent, pour suivre la progression des réponses, fixer les rendez-vous, et lancer des appels pour les futures destinations. Donc finalement, je ne le fais pas.

Anastasia, elle, le fait pour accueillir du monde.
Mais alors que je bavarde avec Petra, une allemande soixantenaire qui est aussi le premier voyageur à vélo que je rencontre - Petra a mis tout son fourbis dans un petit local et, quand elle rentrera en Allemagne, elle devra loger chez des amis ou se louer un logement -, Anastasia surgit de nulle part au volant de sa petite voiture et intercepte les derniers mots que nous échangeons en allemand après une conversation en anglais. "Spricht man hier deutsch ?". Anastasia est à moitié autrichienne et vit entre Githio, où nous la trouvons, Athènes et Vienne.
Je ne comprends pas tout de la conversation qui se déroule en allemand entre Anastasia et Petra mais, alors qu'Anastasia est repartie, je me fais confirmer par Petra que j'ai bien entendu "couchsurfing" et qu'Anastasia aime recevoir. Que ne nous sommes-nous fait inviter ? Il nous reste heureusement son numéro de téléphone.
Nous enfourchons nos machines, Petra et moi, pour aller à la recherche d'un office du tourisme indiqué par Anastasia mais ne finissons, à l'autre bout de la ville, que par trouver... Anastasia ! En train de fourrager dans des ordures (à Githio, les ordures n'étaient plus ramassées depuis un moment, créant des amoncellements et des odeurs dont je vous épargnerai le détail) pour trouver de quoi réparer son masque de plongée (Anastasia fait de la chasse sous-marine).

Cette fois, plus question de tergiverser. Anastasia est d'accord "pour une nuit" dit-elle, et me conduit, Petra suivant mais réservant sa venue au lendemain, chez elle où je me vois attribuer un appartement indépendant complet avec cuisine, salle de bains, de séjour, et chambre. Le soir, Anastasia cuisine un risotto de poulpe, de sa propre chasse, et se montre très satisfaite du vin que j'ai apporté. Quand je lui règle ses portes de placard de cuisine au matin (une de mes spécialités : n'hésitez pas à faire appel à mes services !), puis que je lui fixe au mur un énorme miroir dans la chambre indépendante où Petra va s'installer, elle est conquise pour que je passe une deuxième nuit. Puis une troisième alors que Petra prend le bateau pour la Crète. Et quand je lui explique l'art et la manière de fixer des pieds de tabouret en bois, c'est la pension pour la semaine que je gagne. Mais il ne faut pas abuser et c'est couvert d'invitations renouvelées que je reprends la route. Le destin du voyageur.

Pour, vous aussi, héberger des voyageurs, ou vous faire héberger : hospitality club, couchsurfing, et même un site spécialisé pour l'accueil des cyclistes (je conseille !) : warmshowers.
D'alleurs, je reçois tout juste un message d'une famille de Rignieux-le-Franc qui part à vélo (la maman et la grande fille de 7 ans en tandem, la petite de 2 ans dans une remorque tractée par le papa) pour un voyage au long cours (Barcelone, Amérique du sud...) et aurait bien passé sa première nuit à St Maurice de Gourdans : www.unefamilleunmonde.com

samedi 15 mai 2010

le peloton de France


Coup de freins dans les rues de Githio, devant l'hôtel Panthéon. Souliers pour pédales automatiques qui claquent sur le bitume comme les sabots d'un cheval. Pour sûr, ce ne sont pas des Grecs. Les Grecs ont inventé beaucoup de choses mais pas encore l'usage du vélo.

Les maillots bariolés ne trompent pas : "Saint-Etienne - Firminy", "la Mégevoise"... C'est un peloton de Français. Formidable, des frères en cyclisme ? Hum... Ce troupeau reçoit chaque matin sa feuille de route. Premier point à atteindre : le restaurant de midi. Second : l'hôtel du soir. Entre deux, des petites échappées, des contre-attaques, des escarmouches qu'on se raconte à l'étape. Pas d'autre arrêt en route que le restaurant donc pas de visite. Sauf Olympie qui était prévue au programme, "au pas de course, en une heure et demie" reconnaîtra l'un des participants. "Le Magne ? Ah non, on n'y passe pas. On n'a que 2 semaines. Pourquoi, c'est bien ?" Un gros bus suit, qui a probablement servi à les amener en Grèce, et qui ne sert plus qu'à transporter les bagages. Du cyclisme au pétrole, donc. Une organisation de la fédération française de cyclotourisme. Un voyage organisé.
Ouf, ils sont passés, repartis, rembarqués depuis longtemps. Reprenons nos tours et nos détours !

vendredi 14 mai 2010

chevaux légers contre char d'assaut


Ces Allemands n'y vont pas avec le dos de la cuillère. Ils ont posé une caisse de char est-allemand - sans doute un char de transport de troupe, genre notre AMX 10 - sur un camion ouest-allemand. Et les voilà munis d'un camping-car à toute épreuve. Dans la carrosserie, de peut-être un centimètre d'épaisseur, ils ont percé quelques fenêtres. La porte arrière se ferme comme une écoute de sous-marin. Et il y a une marche d'un bon mètre vingt à escalader pour gagner l'habitacle (escalier disponible sur demande). Pour le poste de conduite aussi, d'ailleurs : avant tout mouvement d'entrée et de sortie, il vaut mieux s'assurer qu'on a bien pensé à tout pour ne pas avoir à y revenir ! L'ordinateur est allumé en permanence à l'avant et le GPS trace la route suivie en direct sur les différents fonds de carte ouverts en parallèle.

Ils le reconnaissent, c'est plutôt un véhicule pour l'Afrique que pour le Péloponnèse (consommation dans les 20 litres aux cent). Mais au moins ont-ils les moyens de m'offrir une bonne bière fraiche (sans alcool) sur la route de Githio !

mercredi 12 mai 2010

1000 !


Le sérieux d'un voyage à vélo s'étalonne aux tours de compteur. Alors, il faut célébrer le premier 1000 km. Les roulettes ont tourné sur une route quelque part au bout du Magne (doigt central du Péloponnèse), dans cet endroit où les maisons sont des tours et où tout semble s'être figé dans une éternité de bout du monde. Je ne sais plus combien de temps avait passé depuis le départ, peut-être 2 semaines et demi. C'est vrai, je n'étais qu'à 300 km par la route de mon point de départ - et encore, dont 80 parcourus en train ! - et pourtant, foi de compteur Décathlon de Bologne, j'avais déjà exploré 1000 km de routes et de pistes, avec ou sans bagages, pour aller chercher le pain ou pour aller chercher l'aventure.

(y a des moments où je m'émeux moi-même de la beauté de ce que j'écris ? Ca vous dresse pas les poils, vous ?!!)

mardi 11 mai 2010

Sarkozy, very good !


- Vous êtes d'où ?
- Ego ime gallos. ("je suis français" : oui, nous sommes toujours des Gaulois pour les Grecs, qui eux sont des Héllènes)
- Sarkozy ! Sarkozy, very good !

C'est peu dire que la côte d'amour de Sarkozy dans le Péloponnèse est élevée. S'il se présentait à une élection ici, c'est le succès total qui l'attend. Alors que...

Un vrai bonheur d'être français en Grèce en ces temps de crise. D'ailleurs, Sarkozy, il a bien raison de dire aux Grecs qu'on veut les aider après s'être assuré que la mère fouettarde Merkel ne le voulait pas car, au final, on ne mettra ni plus ni moins la main à la poche que les Allemands, mais, nous, on sera... aimés ! Et c'est vrai que les Allemands doivent avoir les oreilles qui sifflent. Est-ce une raison pour annuler leurs vacances en Grèce comme il se dit partout qu'ils le font ? Je ne vois pas le rapport.

Toujours est-il que faites comme moi : venez en vacances en Grèce en ce moment ! Il n'y a pas grand monde (avec le super sans plomb 100 à 1.80 €, les Grecs n'ont plus les moyens de bouger). Et si comme moi, vous injectez 10 € par jour dans l'économie grecque, ce sera un très beau geste citoyen de soutien !

dimanche 9 mai 2010

le miracle de Mystras


Oui, Mystras est un miracle en soi, un endroit extraordinaire.
Mais ici, c'est des petits miracles du quotidien qu'il s'agit.

Sorti de ma cave du 1er mai avec le soleil, je goûte la toilette en terrasse avec l'eau chauffée sur mon réchaud à essence. La route jusque Sparte. Un tour en ville, à l'antique acropole et au théâtre, avec pique-nique dans les ruines, au musée archéologique. Ce que je craignais se précise : le site de Mystras ferme à 15h et il est déjà 13h45. Je pédale comme un échappé du tour de France les quelques kilomètres qui séparent Sparte de Mystras mais ça ne semble déjà plus en valoir la peine.

Le guichetier m'accueille en français : "C'est votre jour de chance !" Ah ?! "On m'a appelé ce matin pour me dire que je devais restais ouvert jusque 20 h (mais je récupèrerai un autre jour !)". Formidable, alors un billet, s'il vous plait. "Et aujourd'hui, c'est entrée gratuite ! C'est votre jour de chance, c'est un billet de loto que vous devriez acheter !". Une rallonge de 5 heures pour visiter Mystras. Elle était bien nécessaire ; j'y ai passé 4 heures et demi !

vendredi 7 mai 2010

Premier mai pas chômé


C'est Herman qui m'a soumis à la tentation : escalader ce sommet au-dessus de Kardamili qui est le point culminant du Péloponnèse : Profitis Ilias (Prophète Elias), 2407 m. Une bonne moitié des sommets du Péloponnèse, et sans doute de Grèce, s'appelle Profitis Ilias. Un sacré montagnard, assurémment, que ce prophéte.

A l'occasion de ses séjours prolongés, Herman a trouvé un itinéraire original d'accès au sommet. J'enfourche le vélo pour 750 m de grimpée sur route et laisse là une de mes saccoches que je reprendrai au retour, où je continuerai cette route à flanc de coteaux à travers les villages. Puis 800 m de grimpée sur piste jusqu'à un col. 250 m de descente et de remontée. Soit une bonne journée à 1800 m de dénivellée dont la majorité sur piste ! Nuit près d'une chapelle. Départ de bon matin pour les derniers 850 m d'ascension à pieds. A 9h15, j'agite les bras pour qu'Herman valide mon sommet à la jumelle depuis sa plage.

Une redescente tranquille, un petit casse-dale de midi. Et je remonte en selle pour la descente. Mais tout a changé. C'est le 1er mai ! Les Grecs n'ont pas la réputation d'être des acharnés du travail, mais ce sont des furieux du 1er mai. Dans le petit hameau de bungalows en tôle ondulée déserté la veille, c'est barbecues et banquets de partout. Musique locale en fond. Tout un monde monté de la ville se mettre au frais. Je suis invité à manger, à boire, à repartir avec 1/2 litre de blanc de production locale dans une bouteille en plastique. Et quelques kilomètres plus bas, re-banquet et danse sur la terrasse du café de la place du village. Et encore une assiette qu'on me tend... Ce soir-là, ce ne sera pas la peine de lancer mes habituels spaghettis au ketchup ! Et comme je comprends que je n'irai décidément pas jusqu'à Sparte dans la journée, j'accepte une chambre, façon cave, éclairée à la bougie, qu'on me propose dans le village.

Ah oui ! Parce que, ayant réalisé que j'avais franchi la crête des Taygètes et que la Laconie me tendait les bras à l'opposé de Kardamili, j'avais conçu d'abandonner mon bagage là où je l'avais caché, de descendre sur Sparte et visiter Mystras qui, sinon, ne se trouvait pas naturellement sur mon trajet, et de revenir sur Kalamata par une belle route de montagne, histoire d'aller retrouver Herman à Kardamili. Tout cela n'aurait dû prendre que 2 jours, mais... sacré 1er mai !

(Pendant ce temps-là, Herman arpentait vainement le côté "Kardamili" de la chaîne en VTT pour m'intercepter sur mon chemin de retour ! Et mon bagage, lui, aura attendu une semaine au milieu de la montagne, que je daigne passer le prendre en reprenant la route !)

jeudi 6 mai 2010

Herman


Je laisse filer la petite famille de Vizille. Fini le camping-car... Vraiment fini le camping-car ?

En arrivant à Kardamili, je trouve Herman installé au bord de la plage de galets dans son... camping-car ! Pas le modèle de 7 mètres équipés comme un Sheraton mais un bon cru de 25 ans d'âge, sans communication entre le poste de conduite et l'habitacle, repeint en vert par ses soins, dont il a démonté le cabinet de toilettes ("à quoi ça sert ?") pour gagner de la place et installer sa bibliothèque. Il m'explique qu'il passe quelques semaines ici, que personne ne lui a jamais rien dit et qu'il n'y a aucune difficulté pour moi à camper dans le coin. Ainsi débute ma carrière de campeur sauvage grec.

Herman a toujours vécu dans son camping-car ! Même quand il avait une copine en Allemagne, il camping-carisait dans son jardin (à elle), la maison étant trop petite ! Il arrive en Grèce, tous les ans, au début de l'hiver (novembre) et en repart en juin. Il surveille son budget : 200 € par mois, en comptant un restaurant par semaine (avec un budget de 5 € par jour lorsque je fais ma cuisine, je valide ses chiffres !). Plus les trajets aller et retour. Il n'a quasiment pas de frais kilométriques sur place car il reste des semaines au même endroit et ne fait des bonds que de quelques dizaines de kilomètres. Et il va chercher le pain à vélo. En été, il cherche un petit boulot en Allemagne pour financer son séjour en Grèce de l'hiver suivant.

Herman est un amoureux de la nature. Nous sympathisons et passons 2 jours à remonter des gorges à pieds, descendre des pistes en VTT. Mais comme je suis encore un peu speed en ce début de périple, je l'abandonne pour d'autres altitudes (voir "premier mai pas chômé"). Mais pour revenir bientôt. Et nous reprenons nos virées. Herman trouve que je devrais rester un peu. Je trouve qu'il devrait bouger sa coquille pour que nous explorions un peu plus loin. Je le laisse à sa plage de galets. Pas d'email, pas de téléphone, pas d'adresse : pas gagné que je le retrouve un jour, si ce n'est sur un coin de côte du Péloponnèse. Fallait-il rester, fallait-il partir ? Le voyage est fait de rencontres et de séparations.